Cette nuit là, Kyrjä ne dormait pas ; Quelque chose la tourmentait. Après s’être tourné plusieurs fois dans son lit, elle finit par se lever et s’accouda à la fenêtre qu’elle repoussa doucement. Au dehors, la nuit était claire illuminée par l’œil des astres dont l’éclat miroitait sur la neige polis. Au loin, on entendait le meuglement sourd des Berhus sauvages dont la froide saison échauffait les ardeurs ; Et dans cette tiédeur poétique, emmitouflé dans les senteurs « d’orchidée du crépuscule ©» dont elle était emprunt, elle trouva l’espace d’un instant un havre de paix pour son esprit tourmenté…
Mais rapidement, les questions assaillir à nouveau sa quiétude, troublant ses songes délicats de relents d’angoisses et de rage despotique. Elle quitta la fenêtre et s’approcha d’un bureau rustique duquel elle tira plusieurs parchemins usés et une plume. S’installant confortablement, elle commença à en mordiller l’extrémité en réfléchissant aux tournures de ses phrases…
Dame Hystryana, cette situation ne peut perdurer. Retrouvons nous à la prochaine lune au cœur des mers gelés pour régler une bonne fois pour tout ce différent entre dignes Valkyries et que la voie martial nous…
Nerveusement, elle ratura ses écrits et prit un second parchemin après avoir réfléchie à une nouvelle approche…
Savez vous dame Hystryane qu’hier soir encore, j’étais au coté du sire ? Nous nous étions donné rendez vous au pied de la tour des vents mugissants et avons longuement conversé, marchand cote à cote : Lui indifférent à la tourmente des éléments et moi protégé par ses larges épaules de titan…
Non, trop provocateur…
A nouveau sa plume rendu hérétique par une main fiévreuse satura le parchemin de gribouilles sinueux. Loin d’être découragé, elle prit une nouvelle feuille…
Dame Hystryane, j’ai maintes fois imaginé trancher notre différent par le fils de l’épée, mais aujourd’hui j’y vois plus claire… Quelques que puisse être l’issu d’une confrontation entre nous, ses effets seraient dévastateur pour nos sœurs ; Si je venais à succomber, j’ose croire qu’une chasse sans fin serait donné à vous et votre amant et dans le cas contraire, je vivrais dans la honte d’avoir tué ma sœur pour lui ravir un cœur…
Je préfère affronter mes démons que vivre dans la honte. Ayez l’assurance que je ne l’approcherais plus si en retour vous tenez votre langue. Nos sœurs ne doivent pas savoir…. Jamais !
Nerveusement, elle passa sa main sur ses tempes, ébouriffant sa chevelure par le vas et viens de ses doigts agités. Tout, elle voulait tout ! La santé de son clan, son honneur, l’homme… Une seule alternative pourrait lui offrir ce dont elle désirait. Hystryane devait renoncer. Après tout puisqu’elle était l’héritière, ce n’était pas à elle de s’effacer ! Elle comprendrait…
Dame Hystryane, vous connaissez l’estime que j’ai pour vous, votre vaillance, votre sens du devoir, votre esprit de sacrifice. Il est de ces choses dans nos vies, qui mérite que l’on sacrifie son bien être à leurs profits. Votre clan en est une. Vous êtes une femme de bon sens, j’en ai la conviction. Et vous n’ignorez pas les conséquences néfastes qu’aurait une querelle interne compromettant l’héritière. J’en appel à votre raison dame, renoncez avant qu’il ne soit trop tard… Ce guerrier n’est pas pour vous.
Satisfaite, elle souffla rapidement sur l’encre, roula le parchemin et apposa la cire chaude. Puis, tirant son corbeau de sa cage, elle fixa la missive à l’une de ses pattes et l’approcha de la fenêtre entrebâillé. D’un mouvement sec du poignet, elle l’invita à prendre son envole. Consciente que son œuvre ne l’aiderait en rien à trouver le sommeil, elle reprit place sous le plafond étoilé le nez pointé vers son hublot et, les yeux mi-clos, se laissa bercer par le râle des Berhus…
